Raid Evolénard en 29'

Depuis que je me suis offert un VTT grandes roues au printemps 2013, je n’ai pas encore eu l’occasion de faire une comparaison en course avec mon ancien 26’. En effet, j’ai eu quelques soucis de santé cette année-là , et n’ai participé en fin de saison qu’à quelques courses inédites pour moi.

Cette année, j’avais prévu en mai de participer à la Glânoise (Mifroma Trophy), 39 km et 900 d+, bien casse-patte, ma course de référence, que je connais par cœur et à laquelle j’ai déjà participé 7 ou 8 fois. Mais en 2014, pas de bol, le parcours a été modifié, et en plus il y a eu pas mal de boue. Et par conséquent, aucun enseignement objectif chiffrable à en tirer.

Alors voilà le Raid Evolénard, petit parcours, que j’avais déjà couru en 2009, qui fut ma meilleure année.

Petit topo du Raid Evolénard : 28 km, 1000d+, une grande montée entrecoupée par un single sympa, une grande descente avec 2 km à plat sur goudron au milieu, et un beau single suivi d’un faux-plat interminable à la fin.

Dans le box de départ, avec Guyrando, bien placés quasi tout devant d’un peloton de moins de cent concurrents. Les conditions météos sont idéales pour moi : temps couvert, température fraiche, limite gla-gla, il va faire bon frais dans la descente ! J’ai donc prévu les manches, au contraire de Guyrando qui claque déjà des dents.

Pendant l’échauffement, j’ai observé le départ du grand parcours. Il s’est fait sous conduite, tranquille, pas trop vite ni trop lent. Cool, je déteste et supporte mal les départs en boulet de canon.

10h30 : top départ. Et voilà que pour nous ça part à fond la caisse : départ sous conduite, mon œil. Ah les sagouins ! J’envoie d’entrée, en danseuse, en essayant quand même de pas faire trop monter le lactique.

Courte et rapide descente, en sens inverse du Grand Raid, traversée du pont et on attaque la montée. Pas trop de monde, j’arrive à prendre mon rythme. Passage à proximité du joli hameau de Lana, avec une bonne pente dans laquelle me double une fille. Dès que ça devient moins raide, je la redouble à l’aise, au train, en me disant à moi-même : Ah tu vois ma petite, ça ne sert à rien de faire le forcing dans les raidards si tu reste plantée dans le km suivant. J’essaie de plutôt mouliner, afin de garder les watts pour le haut et le final.

Ça grimpe, sur une route forestière roulante. Quelques épingles, avalées sur un bon rythme, mais en en gardant un peu sous la pédale. Devant, pas grand monde en vue. Petit portage de 10 secondes, avec au sommet un concurrent assez grand qui s’arrête pour prendre un gel. Retour en selle pour un joli single. J’entends quelqu’un derrière. Je n’aime pas me faire coller dans les singles, alors je demande s’il veut passer. Pas de réponse. Je suis assez crispé dans cette première descente, avec les marches et les racines. Puis ça redevient plus plat, avec des petites bosses à passer à l’arrache.

Devant, plus personne, derrière non plus, je ne dois pas être si nul, alors. Du coup, je me détends, et je peux prendre mon rythme sans devoir faire attention à d’autres concurrents.

Ici, c’est vraiment le pied, mais je fais attention quand même de pas me mettre trop dans le rouge, ni d’aller embrasser un sapin. Sortie du single avec un bon raidard, limite de délestage de la roue avant, le tout en faisant un coucou à la photographe.

Premier ravito, puis ça remonte, sur une route d’alpage. J’ai un peu de mal à reprendre le bon rythme, pas de bonnes jambes pendant une ou deux minutes. Allez mon grand, reprends-toi ! Mais tout finit par s’arranger. Et je peux mettre plus de watts que dans la première partie.

Et ça grimpe, une épingle après l’autre. J’ai un petit coup de moins bien. La fille de tout à l’heure me redouble. C’est une jeunette, visiblement moins de 20 ans, mais avec un bon coup de pédale. Le Grand, et ce n’est pas Guyrando, me redouble aussi. J’ai vraiment l’impression qu’il y a de plus en plus de grands de 180 cm et plus dans ces courses VTT.

Le Grand s’éloigne inexorablement, avec la Fille 30 m devant lui. Je suis peut-être un peu en manque de condition, je n’ai pas encore beaucoup roulé cette année. Pas de panique, mon petit Cricri, essaie de limiter les dégâts. (Je me parle à moi-même… )
En plus, je suis sûr que tu as de l’avance par rapport à tes temps de passage de 2009. Et de toute façon, il est totalement EXCLU que tu termines derrière ces deux-là ! Alors mon petit Cricri, t’as encore le temps de les reprendre dans la descente.
On passe à côté de quelques chalets, avec les bonnes odeurs de grillades et les gens qui boivent l’apéro.

La route d’alpage se transforme en piste pour vrais 4x4, et pas pour 4x4 de Genevois (ou Parisiens, c’est selon ). Ici le 29’ est forcément à son avantage. On dépasse la limite des arbres. En levant la tête, j’aperçois des concurrents dans la dernière traverse avant la descente : tcheu le dénivelé qu’il reste à surmonter ! Alors courage Cricri, t’es bien en avance, tu vas exploser le chrono aujourd’hui, et il semble bien qu’il ne doit pas avoir des masses de monde devant toi.

Deuxième ravito, alpage de Niva, en doublant des concurrents du grand parcours partis 30 minutes avant nous.
Dernière épingle. La Fille possède 200 m d’avance et le Grand 100 m. Ca devient un peu boueux. Je perds de vue la fille, qui fait sûrement le forcing. Mais je remonte un peu sur le Grand. Coup d’œil au chrono : Mon petit Cricri, ça va le faire !

Sommet en vue, je remonte les manches et ferme le maillot. J’ai une montée d’adrénaline en pensant à la descente : SAWASHIER ! Les pauvres, je vais les rattraper vite fait bien fait, d’abord le Grand, puis la Fille, puis les doubler, et je vais te me les DEPOSER ! Y vont pas voir le jour ! Et prendre un rhume, en plus ! Ouais, parce que je ne suis pas trop nul dans les descentes de ce genre.

Sommet : 1h14, 8 minutes d’avance par rapport à 2009.

(En 2009, j’avais couru la ELSA le dimanche précédent, 60 km casse-patte sous la canicule et que j’avais terminé sur les rotules, et il est donc possible que je n’avais pas totalement récupéré. En plus, en 2009, j’avais essayé ici de faire un negativ split, et peut-être que j’étais trop en dedans dans la première moitié de la montée. Bref, cet écart de 8 minutes entre 26’ et 29’ est à relativiser. On verra ce qu’il en est après la descente, qu’en 2009 j’avais fait vraiment à bloc)

J’attaque la descente au sprint en danseuse. C’est une route d’alpage très rapide. A la première épingle je suis déjà dans la roue du Grand. Je reste derrière lui un moment, le temps de trouver l’ouverture. J’avais décidé ce matin de ne pas me tuer aujourd’hui, et aussi de ne tuer personne. Alors je ronge mon frein un petit moment (c’est une image, n’est-ce pas ?).

Une ouverture, « A GAUCHE ! » et gaz. J’utilise tous les appuis, et plante des gros freinages de goret avant les épingles. Oh mon dieu les freins que j’ai : cette semaine, j’ai changé les plaquettes et monté à l’avant un nouveau disque alu/acier Avid. Et pendant le rodage, j’ai peaufiné la position des leviers pour un meilleur senti. Bilan : Y a pas intérêt de se gratter le nez en freinant de l’avant.

Je n’ose pas trop regarder autre chose que la trajectoire, mais il me semble bien que je reviens sur la Fille. Mais pas aussi rapidement que je le voudrais.

On arrive sur la route goudronnée qui mène à Arolla. Ce matin, j’avais été repérer l’endroit, et donc je sais exactement quelle trajectoire il faut prendre à la sortie de la route d’alpage pour ne pas devoir freiner et garder le maximum de vitesse dans le pif-paf suivant. Yes, bien joué ! Et ensuite 2 km à plat dans les tunnels et galeries pare-avalanches.

J’aperçois la Fille à 100 m devant et je me dis qu’avec mon gabarit et ma puissance, je vais vite la rattraper. Mais non, j’ai l’impression que l’écart stagne. Et que je n’arrive pas à prendre vraiment de la vitesse, car quelque-chose ne tourne pas rond. Je jette un œil à ma roue arrière pour voir si elle est voilée ou si le pneu se dégonfle. Et là, surprise, de bleu, mais il sort d’où, cui-çi ? Le Grand qui me suce la roue ! (C’est aussi une image, hein ?)

Je m’écarte pour qu’il passe, mais il reste derrière. Il a certainement dû faire un sacré forcing sur la route pour me rattraper, et a donc besoin de souffler un peu. Je mène donc un petit km, puis je m’écarte. Le Grand reprend le relais, et ça va vite : même à l’abri, je dois bien appuyer. Mais je récupère la moindre, et je vois qu’on revient un peu sur la Fille. Un peu, seulement : mais elle a mangé quoi ce matin ? Elle a résisté toute seule à deux grands balèzes qui se relaient sur ces deux km en très léger faux-plat montant, bravo !

On quitte enfin la route pour attaquer la descente suivante, celle que je préfère. Comme tout à l’heure, je reste un moment derrière le Grand pour limiter les risques. Puis GAZ ! Mon petit Cricri, si tu veux rattraper la Fille, faut que tu sortes le grand jeu ! Et maintenant !
Et là, mes amis, la descente d’anthologie que je fais, sur cette piste assez raide avec pas mal de caillasse qui gicle, avec des freinages très appuyés, avec l’arrière qui balaye la piste dans tous les sens. Je double facilement quelques concurrents du grand parcours. Et j’arrive enfin sur les talons de la Fille. Et tout de suite je lui lance un « A GAUCHE » très autoritaire. Elle s’écarte. Et je passe !

Allez Cricri ! Gaz ! Mais fais gaffe quand même : il y a deux ou trois endroits où il ne vaut mieux pas louper son freinage.

Vraiment super, mes freins, et en plus en nette hausse concernant leur endurance. Et en fin de compte, sur ce genre de terrain, elle n’est pas si mal, ma fourche . Pardon M. Fox d’avoir dit du mal de votre produit !

Bilan de la descente : un méga panard, en restant raisonnable concernant la prise de risque, sans me faire peur à aucun moment, toujours avec le contrôle et parfaitement à l’aise. Mais visiblement, à voir les quelques concurrents que je rattrape, tout le monde ne place pas le curseur au même endroit dans son évaluation du risque raisonnable.

Enfin en bas. Faut longer la rivière, je jette un œil derrière en vitesse : personne. Puis un single assez intéressant, avec des petits coups de cul à l’arrache qui font bien mal, d’autant que je me sens assez cuit. J’ai l’impression de ne plus avancer. Un gros joker dans un passage boueux avec une planche bien cachée, mais ça passe. Fin du single, avec la pression que le Grand et la Fille me reprennent, car ils sont visiblement plus forts que moi. Mais non, toujours personne derrière. Peut-être que je leur ai cassé le moral ?

Faut remonter la rivière sur une piste roulante de 2 km en faux-plats. Tcheu c’est dur, je suis cuit, j’essaie de donner le maximum. Mais en point de mire il n’y a que des concurrents du grand parcours nettement plus lents. C’est dur de se mettre vraiment à bloc dans ces conditions, surtout que derrière, toujours pas de Fille ni de Grand en vue.

Enfin l’arrivée ! Avec les jambes bien fusillées ! Ouf, parce que la Fille ne termine qu’à 15 secondes ! Et le Grand à 35 secondes ! Merci à eux pour la bourre qu’on s’est tiré. Et aussi merci d’avoir terminé derrière moi….

Guyrando a la bonne idée de terminer au même 5ème rang dans sa catégorie, comme ça, il n’y a pas de jaloux.
Mais l’an prochain, je change de classe d’âge, et je viserai clairement le podium.

Alors, comme disait l’autre : (voix caverneuse) Je reviendrai !

Par rapport à 2009, 1h41, 12 minutes de moins, dont 4 rien que dans la descente, 157 puls moyennes les deux fois. Pour un gars comme moi, 195 cm et 80 kg, il est évident qu’un 29’ est supérieur à un 26’ sur ce genre de terrain. Et ceci au-delà de tous les discours marketing.

Mais bon, le vainqueur au scratch me met quand même 15 minutes dans la vue…

Mais bon, le vainqueur au scratch me met quand même 15 minutes dans la vue…

Je trouve qu'il y a un manque de respect de la part du vainqueur vis à vis de la course que tu as faites, déjà il gagne, il est pas obligé de prendre autant d'avance, tu lui aurais bien laissé faire sa douche avant toi quand même.


Ah voui, j'oubliais, bravo pour cette belle performance si bien relatée.

Super CR, j'ai adoré ! Comme j'aimerais pouvoir me faire autant plaisir sur un VTT dans le D-... dans une autre vie sans doute (question de pratique et d'engagement)

philbon38 écrit:

Je trouve qu'il y a un manque de respect de la part du vainqueur vis à vis de la course que tu as faites, déjà il gagne, il est pas obligé de prendre autant d'avance, tu lui aurais bien laissé faire sa douche avant toi quand même.

Ouais, c'est ce que je dis toujours. Et en plus, les premiers nous prennent toujours toute l'eau chaude des douches,

Blague à part, j'ai déjà roulé avec le vainqueur, mais à l'entrainement, hein... Il est très bien, en plus d'avoir une sacrée grosse caisse S'il me lit, bonnes salutations!!

@Cricridamour Merci pour ton super CR. J'avais l'impression d'y être

put*in de CR .... bravo à tous les deux.... la fille et le grand , c'est un peu comme le "blond" ...

Si non, oui, pour les grands y a pas photos, le 29" c'est top!

Le titre du sujet est bien adapté : le raid evolenard en 29 minutes !!!!
Je me suis quand même lancé à lire (je pense même avoir été plus rapide que 29' lol), et je me suis régalé

Félicitations pour tout
(sauf pour le pouce " )

lebad écrit:

Félicitations pour tout
(sauf pour le pouce " )

OUPS!!

Ouais, mais d'un autre côté, si j'avais mis 29'', y en a qui auraient peut-être lu Raid Evolénard en 29 secondes

Vive le système métrique!!

A part ça, j'ai la roue arrière voilée, f#&@°§$£%ck !!!

Coup de stress : Faut trouver et tester une solution d'ici dimanche et la Bergibique

Chapeau pour le CR

je serais bien infoutu de faire un CR aussi détaillé dans la chronologie que toi après une telle épreuve (ou bien tu roules avec un dictaphone, ou bien c'est moi qui n'est plus lucide quand je termine une course)

Salut Cricri et Guy,
Bravo pour votre course, me suis régalé avec votre CR. Je m'y voyais pozur avoir fait cette course il y a 2 ans , mais en mode rando car j'accompagnais ma femme . Tu te souviens Cricir ??
Ca m'aurait dit de faire le Raid cette année, mais à l'heure où vous attaquiez vote course ...je cuvais mon vin de la veille .....avec ma femme , 40 ans de ma frangine oblige !!
Amicalement Eric